Archive pour la catégorie 'Festival de l’étrange et du fantastique'

La fille du corsaire

corsaire

Nombre de navires ont coulé
Depuis des siècles écoulés.
Seule la fille du corsaire
Est restée, étrange flibustière.

D’une rousseur évasive,
Sous son bonnet, pensive,
Elle cherche dans son miroir
Cette autre en son isoloir.

D’un rendez-vous elle espère,
Rêve d’un fol embarcadère,
Au son d’un armonica déchaîné
Qui la transporterait hors de ce ciné.

Brisant les chaînes de sa prison,
Sous les tocades d’un diapason,
Son corps alangui sous un archet
Déplore tous ses amours gâchés.

Quel amoureux serait assez fou
Pour l’amener d’un rendez-vous
Vers cette quête sans fin de l’âme
Sans se brûler à ses ardentes flammes ?

Un violoncelle, d’un lointain rivage,
L’effleure tendrement, vient à l’abordage,
L’enlace dans un corps à corps
En ce jour pour tromper la mort.

 

26 Mars 2020 – Jeannine Castel

Les poèmes de Chatnine
Photo : Gil Strec sur Facebook

 

De l’autre côté

autr côté

De l’autre côté du portillon,
Mon charmant petit oisillon,
Pour une jolie demoiselle
Vais-je agiter mes ailes
Jusqu’à passer le rubicon ?

De l’autre côté de la porte,
Avec cette nudité en escorte
Aux fines mains de dentellière,
Vers cette mystérieuse lumière
Irais-je pour une dernière prière ?

De l’autre côté, à pile ou face,
Mes désirs figés dans l’espace,
Pourrais-je voir à sa fenêtre
Cet angélique minois apparaître,
Sans pouvoir avec elle renaître ?

De l’autre côté, à ses côtés,
Si la vie m’était ôtée,
Derrière ce voile de dentelle
Mon corps éperdu sans elle
N’aurait d’amour que ses ailes ?

De l’autre côté entrebaillé,
Mes mains sous ce léger déshabillé
N’auraient de cesse pour ce corps
Qu’un amour jusqu’à la mort
Couché à ses côtés, de l’autre côté.

 

24 Mars 2020 – Jeannine Castel

Les poèmes de Chatnine
Photo : Gil Strec sur Facebook

 

 

Entre-deux

entre 2

Entre-deux pour trois poutres,
D’une grange sans paille ni loutre,
Pour une jeune et jolie fermière
Baignée, transpercée par la lumière.

Comme sœur Anne, elle attend, guette,
Son berger promis par la pâquerette.
Cette promise née sous le signe de Zorro,
En attendant, patiemment, fait le poireau !

En compagnie de ces trois poutres
Qui voudraient bien, avec elle, passer outre
Depuis que la jouvencelle aveuglément
Sur la paille couche ses sentiments.

Ces trois poutres au sol, tombées des nues
D’un plafond ancien, accueillaient la bienvenue
Aux hôtes et membres de la famille.
De singuliers drilles, parents de la jeune fille.

Jusqu’au jour où des termites affamées
Menacèrent leurs ciboulots déjà entamés.
Dangereuses, elles furent mises à l’écart
En cette remise, leur dernier étendard.

Depuis elles assistent aux rendez-vous
Entre deux rêves aux délires les plus fous.
Mais la belle bergère d’amour en amourette
N’est jamais satisfaite de ses conquêtes.

C’est ainsi, entre deux, à claire-voie
Que ces poutres dévorées de bonne foi
Comme un feu de paille brûlèrent
Consumées par ces passions éphémères.

La fermière d’un entre-deux en faction,
À leur feu, réchauffa son irréelle fiction.

 

Moralité : 
Entre la poutre et une paille
La paille d’un entre-d’eux tiraille.

 

11 Mars 2020 – Jeannine Castel

Les poèmes de Chatnine
Photo : Gil Strec sur Facebook

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Dis-moi le vent …

le vent

Premiers prémices d’une tempête.
Le vent anime, vides de leur squelette,
Mes pantalons de pyjamas étendus,
Inquiets de son effrayant compte-rendu.

Quelques sifflements me parviennent,
Me rappellent le claquement des persiennes,
Leur va et vient heurtant sèchement la façade
Dont le crépi se remit mal de ces sérénades.

Graffias, excité par ce père fouettard,
Saute, rebondit sur des étincelles de pétards.
Les goélands profitent des courants, planent.
S’ils pouvaient nous alerter du vilain pyromane …

Roucoulades des pigeons sur un proche balcon.
J’aurais préféré voir nicher des faucons
Ou des aigles, des pygargues, voire des vautours
Pour éveiller l’attention des passives tours.

Un week-end de Février à parlementer
Avec l’auditoire de mon château hanté,
Aéré par les bourrasques de l’inspiration
Venues du monde mystérieux de la Création.

Partir d’une idée qui germe subito-presto-extra,
Sans savoir où me conduira cette volubile maestra.
C’est là le sublime d’une magie qui me dépasse,
L’envers d’un décor ivre, grisé par l’audace.

Tant d’êtres aimés m’ont quittée en chemin,
Poursuivant chacun les méandres de leur destin.
Ils m’ont comblée pour ne laisser qu’un vide.
Amèr abandon m’amenant à un puits morbide.

Le vent reconnaissant essuiera mes larmes,
Me distraira avec Guignol et son bâton de gendarme,
Soufflera très fort à ces acteurs malentendants
Qu’il souffre aussi de ces faux prétendants.

Et de soupirs intempestifs, comme un affreux violeur,
Il détruira tout ce que ce monde sans valeur
Croyait posséder en détournant les règles et lois.
Il réduira en poudre ces chasseurs de la St Éloi.

Partie des prémices d’une tempête,
Je me retrouve, vagabonde silhouette,
Face aux avaries perpétuelles d’un marionnettiste
Jouant avec les ficelles d’une prétendue artiste.

Est-ce le vent, est-ce la pluie,
Est-ce l’amour qui crève d’ennui,
Est-ce vous, est-ce toi, pour qui, pourquoi,
Dis-moi le vent, dis-moi …

 

Un jour venté de février 2020 – Jeannine Castel

Les poèmes de Chatnine
Photo : Amandio Antunes photographie sur Facebook

 

 

 

La châtelaine

chatelaine

Une vilaine marâtre,
Froide comme cet âtre,
Va marier sa fille
Au pirate Estampille,
Éléphant à la trompe
Tronquée par un psychopompe.

Face à son miroir,
La fille en ce manoir,
Dans sa robe de mariée
Attend ce promis flibustier
Sous l’œil attentif
D’Estampille sur son esquif.

Depuis ce bal d’un soir,
Escortée de fols espoirs,
 Sa robe de fines dentelles,
Brodée par des hirondelles,
Nouée d’un ruban ajouré
Souligne sa taille énamourée.

Devant ce haut fourneau,
Épargnée par le Docteur No,
James Bond en personne
Aurait aimé cette mignonne,
Fasciné par cette châtelaine
Au bal du « Bas de laine ».

Mais prisonnier d’Estampille,
Il assiste, derrière les grilles,
À ce mariage cousu de fil blanc
De sa belle se contemplant
Dans ce palais habité par le rêve
Pour que l’amour ne s’achève.

 

12 Mars 2020 – Jeannine Castel

Les poèmes de Chatnine
Photo : Gil Strec sur Facebook

 

La fleur de chai (4)

papillon

Poursuivie par le spectre de la geôlière
Et les yeux de Shiva sans moulins à prières,
Je refusais de croquer à belles dents
La pomme sur les fresques de ce confinement
Aux voutes tachées de poudre noire à canon,
Aux niches vermoulues ensanglantées par Cupidon.
Je laissais Réchampir aller où bon lui semble,
Forte d’un prochain rendez-vous fixé ensemble.
Me détacher de ce bas-fond à l’unique ouverture
Retrécissait la voie de cette étrange aventure.
Cette lumière vive, suspecte, m’éblouissait trop …
Je redoutais un piège quand soudain incognito,
Une arche m’offrit un passage très étroit.
Plongée dans l’obscurité, dieu qu’il y faisait froid.
J’avançais à tâtons dans de sinueux couloirs,
À l’affût du moindre souffle porteur d’espoir
Qu’une issue probable m’attendait quelque part
Sous cette forteresse de tours et de remparts.
C’est alors qu’une splendide fleur bleue phosphorescente,
Dont la turquoise précieuse de mon âme d’adolescente,
Me fit penser à des ailes de papillons rieurs
Pris d’un fou-rire en voyant ma stupeur.
Me penchant pour les admirer, les sentir de plus près,
Une odeur inconnue aussitôt déçut les regrets
De ma sensibilité ornée de belles émeraudes.
Avant que mon corps devienne de la guimauve,
Je laissais ces fleurs à leur triste sort
Imaginant que c’était peut-être un essor d’un sort
Pour embellir ma folle poursuite, escortée
D’un Réchampir kiffé par l’esprit de beauté.
Après ce trésor fleuri, décidée plus que jamais
Je les emportais gravées sur un joli camée.
Dans mon euphorie, que j’ai embaumée,
Je n’avais pas vu que fortement enrhumées
Deux souris à l’unisson se mouchaient
Et que je me retrouvais dans un ancien chai …

 

19 Mars 2020 – Jeannine Castel

Les poèmes de Chatnine
Photo copyright Julien Meyrat PhotosArts sur Facebook

 

Confinement ou remaniement ? (3)

Réchampir

Confinement ou remaniement, Réchampir
Surgit d’un souterrain de mes passe-temps.
Son ombre imposante, chargée de souvenirs,
De poésies bourgeonnant à l’approche du printemps,
Me fige en ce dilemme … Un duo de Réchampir ! …

Mon signe zodiacal aussitôt convoqué en témoin,
De gémeaux confrontèrent ma plume interloquée
Et sans le moindre hoquet se mirent à débloquer
La clé de ces deux boitiers musicaux où Merlin
Siégeait…  Obstacles divins !

Ramenée soudainement dans les caves de mon cru,
En ce temps de disette pour les rencontres,
Mon esprit enveloppé d’une brume écrue
Était prisonnier entre deux tours de montre !
Serais-je dévorée toute crue ?

Je cherche le chemin des oubliettes …
Vers les bois et leurs jolies fleurettes.
Je cherche une issue, loin de la geôlière,
Poursuivie par l’ombre familière
D’un monde oublié sans lumière …

 

18 Mars 2020 – Jeannine Castel

Les poèmes de Chatnine
Photo : Gil Strec sur Facebook

À la poursuite de Réchampir (2)

orgues

À la poursuite de ce Réchampir,
Les Grandes orgues majestueuses de la forêt
Vibrèrent de toutes les forces du repentir
En ces Monts de la Marche vers l’avenir
De mon existence éplorée.

Franchissant les barreaux de ma prison,
Haletante, vers l’inconnu de cet horizon,
Telle Blanche-neige poursuivie par une sorcière,
Je me hâtais vers cette lueur hospitalière,
Le cœur battant en pâmoison.

Était-ce un rêve, un affreux cauchemar
Resté tout au fond d’un trauma mémorial ?
Ou une niche affective d’un de mes plumards,
Partenaire amical du jeu « Oscar-trivial »
D’une scène pour « Génie-génial » ?

Une partie de colin-maillard forestière
Animée par la complice forêt de Chabrières
Et ses hôtes, templiers ou chevaliers,
Sortis pour me sauver de ce bourbier
Covid-19 de chiens sans collier.

Ainsi fuyant l’ombre des sous-bois,
 J’avançais, cherchais dans leur profondeur,
Ce Réchampir aimé, frondeur baroudeur,
L’esprit tourmenté, l’âme aux abois
D’un souvenir enfoui en moi …

 

18 Mars 2020 – Jeannine Castel

Les poèmes de Chatnine
Photo copyright Julien Meyrat PhotosArts sur Facebook

Forêt de Chabrières

forêt

Forêt de Chabrières,
J’aurais tant aimé
Que dure cet automne
Effeuillé désormais,
Dissipé dans les ornières.

En ces monts de Gueret
Je m’étais égarée.
Le cœur tout guilleret,
Je me suis attardée
Sur cette rousseur fardée.

Me suis-je endormie
Jusqu’à cet instant ?
Ou est-ce la brume,
Douce et secrète amie,
Qui a lié ma plume ?

Le temps d’un soupir,
Me revient ce souvenir
Sous cette houppelande,
D’une mystérieuse légende
D’un fidèle Réchampir.

 

18 Mars 2020 – Jeannine Castel

Les poèmes de Chatnine
Photo copyright Julien Meyrat PhotosArts sur Facebook

La fin du Mont

fin du mont

Un viking borgne, aux ailes noires,
Ange déchu d’une sombre histoire,
Veut ensevelir le Mont St Michel
À la barbe de la bavarde mère Michel
Désespérée, affolée devant le serpent
Vers le Mont, ondulant, rampant.

Un sol craquelé imperméable à la pluie
Sous des éclairs furieux faiblement luit.
Le Mont dans l’obscurité en ce désert
Implore St Michel pour sa sécurité.

Son épée, mat de ce vaisseau en danger,
Met au défi ce démon prêt à engager
Une guerre entre le ciel et la Terre.
Vaillant archange contre un mercenaire.

Une mer de boue au sable mouvant
Pousse le Mont à l’infini du monde vivant
Vers un horizon, brasier ou paradis,
Où un chat naufragé comme Vendredi
Sur une île déserte meurt de faim
Depuis que le Mont a perdu son saint.

Nouveau jardin d’Eden modernisé
Où Eve et Adam ont fini carbonisés,
Exterminés par les passions et la folie
D’un monde disparu sous les pandémies.

 

25 Février 2020 – Jeannine Castel

Les poèmes de Chatnine
Photo : Adrien Oustelandt Photography sur Facebook

 

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