Pauline s’en est allée …
J’ai retrouvé, avec Filae, la nuit
Où ma grand mère paternelle en chemise de nuit,
Après quelques heures d’agonie,
S’en est allée en ma compagnie.
Après le test du miroir, en attente du médecin,
Elle a rejoint les Saints, son cancer au sein.
Je restais là, debout, au pied de ce lit en ferraille,
Pendant que s’agitait tout autour la volaille
Venue en renfort épauler ma mère pleurnichant,
Mon père à la pêche ou au boulot, était absent.
Il fallait, avant que le corps refroidisse,
Vêtir, adoucir les visites d’amis, anciens complices.
Je n’ai pas souvenir de la visite d’un curé,
Ces commères étaient tout … de vrais furets !
Quand elles soulevèrent le corps de grand-mère,
Un soupir inattendu troubla cette morbide atmosphère.
En criant : « elle est pas morte ! » ces croque-mères
Apeurées, affolées, laissèrent retomber ce corps grabataire
Qui écrasa le gémissement merdeux sorti de son derrière.
Prenant la poudre d’escampette, ces croque-mitaines
Nous laissèrent toutes deux en quarantaine !
C’est alors que me revint en mémoire cette chanson
Que me chantait Pauline sur ses genoux maigrichons :
« Pan, pan, pan, tirelire
Les soldats se retirent
Il en reste plus que deux
Qui ont le cul merdeux ! ».
Ces braves femmes, remises de leurs émotions,
À nouveau s’approchèrent, toutes en dévotion,
Pour enfin présenter cette pauvre Pauline
Qui les avait connues, pour certaines, gamines.
« le 37 » pour sa maison de presse si redoutée,
À cette occasion, s’est vue décorée de tentures veloutées.
Un brin de laurier, une veilleuse, de l’eau bénite,
Ma grand mère à l’étroit dans cette guérite …
Une porte s’ouvre, se referme. Où ai-je dormi ?
Pendant ces trois jours où Pauline, endormie,
Avait enfin retrouvé le repos de l’âme,
D’une vie remplie de nombreux drames,
Ce dix Septembre 1958 de feu et de flammes.
Jusque dans la mort ma grand mère m’aura divertie
Dans cette vie aux incontrôlables péripéties.
27 Avril 2017 – Jeannine Castel
photo de Gil Strec sur Facebook
